
Shepard Fairey artiste américain

Frank Shepard Fairey ou Shepard Fairey, également connu sous le pseudonyme OBEY, est un street artiste américain, sérigraphiste, muraliste et illustrateur né le 15 février 1970 à Charleston en Caroline du Sud.
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Chronique d' Alexis Jenni, le 18/01/2022
conversation
La revue Étudesavait organisé un débat, une discussion, une table ronde, enfin un dispositif qui permettait à des invités de converser.
Il y avait Pierre Hurmic, le maire ; Véronique Fayet, présidente sortante du Secours catholique, Daniel Truong Loï, professeur de philosophie en prépa, et Nathalie Sarthou-Lajus, rédactrice en chef adjointe de la revue, chargée d'animer le débat.
Le sujet en était : « La fraternité est-elle possible en politique ? »
La salle était bondée, une salle voisine l'était aussi, avec écran, le débat était transmis en direct sur YouTube. Une telle affluence montre l'appétence pour le vrai débat.
C'est beau la parole partagée, c'est son essence de l'être, partagée, elle a été inventée pour ça il y a quelques millions d'années, c'est elle qui fait l'homme : celui qui parle ensemble. C'est une fête de l'esprit, une réalité augmentée, c'est une construction de soi. Les trois personnes présentes conversèrent autour de la fraternité, notion complexe, qui vaut qu'on en parle. Depuis 1880, elle est gravée sur les frontons des bâtiments publics, et depuis la Révolution, elle est devise de la République, mais elle semble le parent pauvre de cette devise en trois temps. C'est que la liberté et l'égalité peuvent se revendiquer, s'obtenir, générer des lois, la fraternité ne se décrète pas. Elle est d'une autre nature : on ne choisit pas ses frères, ils nous sont donnés. On peut manifester avec des banderoles où serait inscrit en grosses lettres : « Liberté ! », « Égalité ! » Fraternité, on l'envisage moins. C'est pourtant un principe constitutionnel, reconnu comme tel, et qui a conduit à l'acquittement des habitants des Alpes qui aidèrent des migrants à survivre dans la neige, à passer la montagne et à entrer en France. C'était illégal du point de vue juridique, mais conforme au principe de fraternité. N'est-ce pas scandaleux que des faits échappent à la loi en vertu d'un principe ? Le principe de fraternité n'est pas négociable, c'est lui qui fait les sociétés, il est le terreau de tout élan collectif : on ne peut tout simplement pas vivre ensemble sans fraternité.
La fraternité a pour vocation d'être universelle, c'est l'amour de l'autre en tant qu'il est simplement là. La solidarité ne suffira-t-elle pas ? Hélas, la solidarité est un mécanisme, un dispositif indispensable mais qui s'use ; la fraternité est un élan, elle permet de ne pas s'épuiser à être solidaire. Elle ne s'use pas, elle dure. Quand j'ai rencontré un frère, je ne peux l'abandonner, ce que je n'accepte pas pour moi-même, je ne l'accepterai pas pour celui qui est devenu mon frère. Mais il y faut la rencontre, car la rencontre est la seule chose qui change le c½ur de l'homme ; les discours, ça glisse. Ainsi tout projet urbain est aussi – doit être – un projet social : favoriser la rencontre et le mélange plutôt que la séparation et l'entre-soi qui détruisent nos sociétés inégalitaires, qui détruisent la possibilité de fraternité.
Ce monde marche sur la tête, on le voit bien, il est alors raisonnable de renverser la table. Les préjugés quant aux pauvres, aux migrants, ces intrus, sont si profondément ancrés qu'il faut une révolution, une révolution fraternelle. Rien de sanglant mais un renversement de ce que l'on croit sans savoir : l'étranger fait peur là où on ne le voit pas. Il faut sortir le social du ghetto caritatif, non pas aider les gens mais faire qu'une entraide naisse. L'aide ne respecte pas la dignité, la personne aidée a pourtant des talents. « J'ai besoin de toi », c'est la clé de fraternité. « C'est dans les oasis de fraternité que se préparent les sociétés de demain », écrit Edgar Morin.
J'ai écouté converser celui qui gère, celle qui suscite l'entraide, celui qui pense, j'ai pris au vol ce qui se disait, et j'en fais un montage exact mais sans nommer qui parle : c'est inutile, c'était une tresse collective, une réflexion à plusieurs, une pensée construite là et offerte à tous. Je n'avais jamais pensé précisément comme ça, j'en sors enrichi, je ne m'attendais pas à l'être.
Étrangement, il a été fait dans cette conversation l'éloge de la marche urbaine, et des aménagements qui la favorisent, car le piéton est le seul qui en ville s'expose à la merveilleuse sérendipité, ce miracle de trouver ce qu'on ne cherchait pas, alors que l'on cherchait autre chose. La sérendipité, c'est bien la vertu de la conversation.
alcibiade, Posté le mardi 18 janvier 2022 06:00
Nature-Boy101 a écrit : " "
merci Thomas, bises également !